Petite histoire des cartes
Comment ont résolu les hommes le problème de dessiner la Terre sur une surface plate ? Dans cette histoire, nous verrons les différentes manières, qui ont été employées dans les premières époques pour le résoudre.
La carte la plus ancienne conservée est gravée sur argile et vient du troisième millénaire av. J.C. Des archéologues l’ont trouvée dans une des excavations effectuées dans l’ancienne ville de Ga-Sur, à un peu plus de trois cents kilomètres au nord de Babylone.
Elle montre sous forme de plan, de petits ensembles, c’est-à-dire des parcelles de terre avec vallée et rivière, probablement le Tigre, entre deux lignes de collines. Elle indique clairement les directions est, nord et ouest ; par contre, il manque l’échelle. Il est significatif que le peu de cartes qui nous sont arrivées des temps éloignés soient dessinées sur des tablettes de terre cuite, une matière résistante. Car les cartes s’usaient, elles s’altéraient ou se perdaient dans les incendies et les inondations, certaines étaient détruites pour empêcher qu’elles ne tombent pas entre les mains ennemies.
La Rivière Océan
Les anciennes civilisations avaient besoin de plans des routes pour leurs armées et négociants, ainsi que des cartes cadastrales, c’est-à-dire, plans de parcelles, à des fins fiscales. Au Moyen-Orient, les archéologues ont découvert plusieurs plans et cartes babyloniennes, inscrit sur des tablettes d’argile, qui
reprennent des domaines et des petites villes jusqu’à toute
la Babylone. Une tablette du VI siècle av. J C. représente la Terre, qui s’identifie avec le monde connu centré sur Babylone, comme un disque entouré par la légendaire Rivière Océan. Mais la contribution fondamentale des Babyloniens à la science de l’élaboration des cartes, ou cartographie, appuie son étude sur le mouvement des corps célestes et sur la division du cercle en 360°, système qui est encore utilisé actuellement. Il est probable que les astronomes de Babylone savaient déjà dans le troisième millénaire avant Jésus-Christ que la Terre était ronde, un compendium d’astrologie préparé durant l’année 1870 av. J C. par Sargon d’Acad pronostiquait une longue série d’éclipses de Lune.
De l’ancienne Egypte, on conserve moins de cartes, puisque les cartographes et les arpenteurs utilisaient toujours du papyrus, un matériel n’étant pas aussi durable que l’argile. La première carte tracée sur le papyrus date de 1300 av J.C. et c’est un plan de routes qui conduisaient à une zone minière du désert oriental. Mais il existe de nombreux preuves que la cartographiques, spécialement dans le tracé des cartes cadastrales, était très développé. Les Égyptiens ont été les premiers à calculer le secteur des terrains de manière irrégulière en jalonnant de triangles le sol. Cette méthode, appelée de triangulation, est encore utilisée actuellement.
Quant à l’Est, on sait qu’en Chine on faisait des cartes, il y a 2.200 ans, mais on n’a trouvé aucune précédent le XII siècle.
Le puits de Syène
Les anciens Grecs ont consigné les bases de la cartographie moderne, et son oeuvre, a culminé par Claude Ptolémée au II siècle de l’ère chrétienne, elle fut la plus avancés en la matière, et a duré jusqu’au XV siècle. Les premiers philosophes grecs, comme les Babyloniens, pensaient en principe, que la Terre était un disque plat entouré d’eau ; ses cartes, quant au reste, reprenaient seulement des petites zones, bien qu’au V siècle av. J.C. ils connaissent déjà la région qui s’étendait depuis l’océan Atlantique jusqu’à la rivière Indus. Plus limitée était la connaissance des terres situées au nord et au sud de la Méditerranée, et ne mettait pas en doute d’admettre que le monde habité, l’oikoumene, était plus large que haut.
Toutefois, au début du IV siècle les Grecs ont formulé la théorie que la Terre était sphérique, en se basant plus sur des arguments religieux et philosophiques que des raisons scientifiques. Le fait est que, comme il s’est produit souvent dans l’histoire de l’humanité, ils ont atteint la vérité par un chemin erroné. Aristote enseignait que la Terre était un globe stationnaire suspendu dans le centre de l’Univers. L’année 370 av. J.C., Eudoxo de Cnido a essayé de calculer la longueur de la circonférence de la Terre en mesurant la différence de hauteur d’une étoile depuis deux lieux. Mais son résultat différait du chiffre actuel, par un excès, de 60 pour cent.
Erastosthènes (276-194 av. J.C.), a qui l’on doit le mot géographie (géo = la Terre, graphein = dessiner en Grec). On lui doit aussi la première carte géographique fiable.
Il enseignait à Alexandrie, dans le grand centre de la culture pendant l’empire d’Alexandre le Grand. Il a été le premier à mesurer avec exactitude la taille de la Terre en observant que pendant le solstice d’été il était possible de voir dans un profond puits de Syène, au sud de l’Egypte l’Assouan moderne, et comment le Soleil se reflétait dans son fonds, il a déduit qu’il se trouvait à la verticale du lieu. Or, dans la ville d’Alexandrie au même moment, l’obélisque possédait une ombre. Il a supposé que l’Alexandrie était au nord de Syène, sur le même méridien, et a calculé précisément la distance entre les deux villes.
Il a ensuite mesuré l’angle que le Soleil formait à Alexandrie avec la verticale et il a trouvé que c’était un cinquantième de cercle, (alfa) 7°12′. Les rayons du Soleil étant parallèles et ils se propagent en ligne droite, l’angle ainsi mesuré d’Alexandrie correspondait à l’angle formé au centre de la Terre par les rayons terrestres de Syène et d’Alexandrie, et, par conséquent, à l’arc du méridien compris entre l’un et l’autre. Sur cette base, il a calculé que la longueur d’un méridien était cinquante fois la distance (bêta) entre Syène et l’Alexandrie. Bien que ses mesures et hypothèse ne soient pas précises, puisqu’elle considérait la Terre comme une sphère parfaite, quand en réalité elle est aplatie aux pôles et légèrement plus volumineuse à l’équateur, ses erreurs sont équilibrées par quelques autres. Le résultat final différait seulement dans quelque (bêta) 80 kilomètres de la mesure aujourd’hui admise. Au cours du II siècle avant J.C. Hipparque, sans doute un des plus grands astronomes grecs, a développé les idées d’Eratosthènes de la cartographie. Il a souligné la nécessité de fixer les longitudes et les latitudes d’un nombre suffisant de lieux par des moyens astronomiques, et a suggéré que le réseau de méridiens et de parallèles soient réguliers.
Ptolémée et sa « Géographie »
On sait peu de chose de la vie de Ptolémée, astronome éminent et mathématicien grec du II siècle de l’ère chrétienne. Il vivait et travaillait à Alexandrie, où il avait accès à la bibliothèque magnifique et au musée. Il a écrit plusieurs importantes oeuvres, entre autres, l’Almageste et la Géographie (aussi appelée Cosmographie). L’Almageste contient ses observations et théories astronomiques, non dépassées jusqu’aux découvertes de Newton, au XVII siècle. La Géographie rend compte des principes du soulèvement, décrit les projections, il indique comment dessiner une carte du monde et comment la subdiviser.
Mesurées avec des étalons modernes, les cartes de Ptolémée sont inexactes. Ses erreurs viennent d’avoir considérer la taille de la Terre plus petite de ce qu’elle est réellement. Cela lui a fait croire que l’Europe et l’Asie couvraient d’est en ouest la moitié de l’hémisphère nord (180°), quand elles ne comprendront seulement que130° ; il n’a pas en outre considéré l’Inde comme une péninsule, il a exagéré la taille de Ceylan et a tracé l’Océan Indien comme une mer fermée. Mais, malgré ses limitations, la Géographie représente une réalisation monumentale, et le sommet de la science cartographique hellénique.
Les cartes romaines
Les Romains ont bien sur confectionner des cartes excellentes. Ils avaient des arpenteurs suffisamment préparés, même si il ne reste que de faibles plans et dessins pour apprécier leur travail. De ses mappemondes, que nous connaissons seulement par des références littéraires, ils sont revenu aussi à l’idée que la Terre est un disque. Probablement, représentant l’Asie dans la partie supérieure de ce dernier, coutume qui a régné dans le Moyen Âge.
Les Romains étaient des gens essentiellement pratiques et la relique la plus importante de sa cartographie est la Tabla Peutingeriana appelé ainsi par le nom du collectionneur allemand qui l’a possédé Konrad Peutinger. Il s’agit d’une bande de parchemins de 34 cm hauteur et de 6.82 m de longueur, dans lesquels apparaissent les chaussées de l’Empire romain avec les distances d’une station à une autre. Elle n’indique pas les points cardinaux, mais elle est une mine d’information et inclut beaucoup de noms de lieux.
Cartes TO
Pendant le Haut Moyen Âge, les connaissances géographiques se limitant aux frontières du monde occidental, les cartographes ont été presque obligées de recourir au mythe et à la fantaisie pour remplir les vides de leurs cartes. Dans le VI siècle, Cosmas, un moine égyptien, surnommé Indikopleustes, a rejeté l’idée que la Terre était une sphère et a soutenu la vieille théorie du disque plat. Les savants chrétiens ont confectionné différentes mappemondes à la manière des Romains, bien que modifiés pour qu’elles soient en accord avec les enseignements chrétiens. Une carte dessinée durant l’année 776 par le moine espagnol Béat de Liébana suivait la manière des Romaines, mais montrait le Paradis dans la partie supérieure (Extrême-Orient) et exagérait démesurément la taille de la Terre Sainte. Pendant cette époque la carte « de T dans O » ou à « roue » a été très fréquente. Le « O » représente le bord de la Terre ; la caractéristique verticale de la « T » était une ligne centrale qui courait du Don au Nil, et le tilde, la Méditerranée. Les cartes étaient variées par la taille et par leurs détails, mais peu nous sont restées. Une est représentative celle d’Hereford, préparé à la fin du siècle XIII, qui montre satires, griffes et monstres entre une grande profusion de détails bibliques ; dans sa partie supérieure apparaît le Christ avec toute sa majesté.
Tant que la cartographie occidentale était maintenue dans les limites de ce qui est décoratif et imaginatif, les dessinateurs du monde arabe, dans le siècle VIII, avaient déjà accès, grâce à des traductions, aux documents de Ptolémée. La mappemonde arabe plus importante a été préparée par Edrisi en 1154, sous le parrainage de Roger II, roi normand de Sicile ; il combine les connaissances précédentes des sources occidentales et orientales et elle est très remarquable par l’information qu’elle apporte sur le Moyen-Orient.
L’atlas catalan
La cartographie a connu un grand essor aux fins du XIII siècle, la carte de navigation ou portulans en étant préparé avec l’aide d’un instrument nouveau : la boussole. Par elle se reproduisent fidèlement les côtes de la mer Noire, la Méditerranée et l’Europe Sud occidental. En général, elles ne contenaient pas de détails de l’intérieur des terres, et la Terre était encore considérée plate. La majorité furent tracées par des dessinateurs italiens et catalans. Il y avait plusieurs cartes en rapport avec ces cartes de navigation, dont la plus connue est la mappemonde ou l’atlas catalans de 1375, important non seulement pour reproduire fidèlement les côtes, mais aussi parce qu’il a considérablement étendu les connaissances sur l’Asie, repris des histoires de voyageurs des siècles XIII et XIV.
L’atlas catalan est oeuvre de Cresques Abraham, rabbin de Palma de Mallorca qui a été pendant de nombreuses années « maître des cartes de navigation » du roi Pedro III d’Aragon. Après 1391 son fils Jafudá a pris en se convertissant au christianisme le nom de Jaume Ribes, il a organisé l’atelier cartographique de la célèbre école ou le centre d’étude fondée par Henri le Navigateur sur le promontoire de Sagres, au sud du Portugal. Une nouvelle ère était né : celle des grandes découvertes des Espagnols et Portugais, qui ont incorporé un continent complet aux mappemondes modernes.